Pourquoi l’analyse de l’état hypothécaire est-elle indispensable pour les experts de l’immobilier ?

L’état hypothécaire est le carnet de bord d’un bien immobilier. Il raconte son histoire : sa situation cadastrale, ses propriétaires successifs, les prêts contractés associés, ou encore ses servitudes qui lui sont rattachées.  Pour les notaires, l’analyse de ce carnet de bord est primordiale avant tout acte notarié, relatant de près ou de loin un bien immobilier (vente immobilière, donation ou succession par exemple). En effet, il doit vérifier un ensemble d’éléments, présents dans l’état hypothécaire, pour assurer la bonne exécution de son acte, et surtout, protéger sa propre responsabilité. En voici les principaux :
            I. L’origine de propriété
Le premier élément lié à l’analyse de l’état hypothécaire consiste à s’assurer du titre de propriété du propriétaire actuel. Pour ce faire, le notaire remonte l’ensemble des mutations successives, jusqu’à « l’origine trentenaire ». L’objectif est d’analyser une par une, les successions, donations et ventes d’un bien, et de s’assurer que le propriétaire correspond effectivement à l’acheteur, ou au bénéficiaire de la mutation précédente. Et ainsi de suite jusqu’à la dernière mutation, au moins 30 ans en arrière. Pourquoi 30 ans ? Parce qu’il correspond au délai de prescription le plus long. Ainsi, en s’assurant que le propriétaire est bien le propriétaire découlant d’une chaîne de mutations remontant au-delà de 30 ans, aucune autre personne ne pourra revendiquer la propriété du bien.
          II. La présence de charges en cours de validité
Le deuxième élément à vérifier pour un notaire lors de l’analyse d’un EHF, concerne la présence ou non de charges en cours de validité sur le bien. Les charges se déclinent en différentes natures : a. Les privilèges b. Les hypothèques c. Et les servitudes. a. Prenons d’abord les privilèges. Ces charges sont liées à l’existence d’un prêt ou d’une créance bénéficiant d’une priorité de son remboursement. Les formes de privilèges les plus souvent rencontrées sont le privilège de prêteur de deniers et le privilège de vendeur. Le premier désigne un emprunt financé par un prêteur d’argent (le plus généralement une banque), lors de l’acquisition d’un immeuble. Le second désigne la garantie du paiement de l’acheteur sur le prix de vente. b. Regardons ensuite les hypothèques.  Une hypothèque est une forme de garantie prise par un organisme prêteur, permettant à ce dernier d’assurer le paiement d’une dette contractée pour l’achat d’un bien immobilier. En effet, en cas de défaut de paiement auprès du prêteur de deniers, celui-ci peut faire appel à son droit d’hypothèque afin de saisir le bien immobilier. La publication des hypothèques est obligatoire pour en assurer la fiabilité.
C’est le Roi de France qui a voulu imposer la publicité des hypothèques en 1553. Mais les nobles des grandes familles se sont opposés à cette réforme, ne voulant pas révéler l’état de leur patrimoine. La révolution française imposera finalement cette publicité, entrainant la création de la Conservation des Hypothèques en 1855.
Pour ces deux types de charges, privilèges et hypothèques, le notaire devra porter attention aux montants de ces créances, à leurs créanciers, à leurs débiteurs et à leurs « dates extrêmes d’effet ». Il devra également avertir son client, en cas de privilèges ou d’hypothèques en cours, pouvant faire baisser le prix de vente. c. Regardons enfin les servitudes. Une servitude est un service que rend un fonds (ici un terrain) dit « servant » à un fonds dit « dominant ». Les servitudes les plus connues sont celles de passage et de vue. La servitude de passage consiste à donner à un propriétaire d’un terrain enclavé, un droit de passage sur la propriété du fond servant. La servitude de vue, elle, permet au fond dominant de créer des ouvertures sur l’extérieur à des distances du fond servant, plus proches que celles réglementées par la loi. La particularité des servitudes et qu’elles sont toujours associées à un bien, et non à des personnes. Ainsi, elles se transmettent de propriétaires en propriétaires, au fil des mutations. Dès lors, que ce soit pour le fond servant ou le fond dominant, le notaire doit nécessairement faire part de l’existence d’une servitude à l’acheteur.
           III. La présence de clauses
Le troisième élément sur lequel le notaire doit porter attention, est la présence de clauses contenues dans des actes de mutations, notamment lors de donations. Il en existe plusieurs types. Voici les plus connues : • La clause du droit de retour permettant aux donateurs de récupérer le bien en cas de décès du bénéficiaire, sans descendance. • La clause d’attribution ou d’exclusion à la communauté, donnant la possibilité d’inclure ou d’exclure le bien dans la communauté qui existe entre le donataire et son conjoint • Et la plus courante, la clause d’interdiction d’aliéner ou d’hypothéquer, qui protège les usufruitiers d’un bien, en empêchant la vente du bien ou la saisie d’un créancier. Dès lors, l’analyse de ces clauses est essentielle dans le processus de lecture d’un état hypothécaire. J’espère que cet article vous aura permis d’en connaître un peu plus sur l’état hypothécaire et sur son importance dans la constitution de dossiers de ventes, de successions ou de donation. Dans le prochain article, vous verrons qu’elles sont les difficultés rencontrées par les notaires pour identifier les éléments décrits ci-dessus.

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